Vente d’Opella : la classe politique s’insurge contre la cession de la filiale de Sanofi

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Tony HOUDEVILLE

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INFORMATION • La décision de Sanofi de vendre sa filiale Opella, responsable notamment de la production du célèbre médicament Doliprane, a provoqué une vive réaction au sein de la classe politique française. De nombreux élus, issus de divers horizons politiques, ont interpellé le gouvernement, dénonçant un danger pour la souveraineté sanitaire et économique du pays.

Une transaction qui secoue la scène politique

L’annonce de Sani, révélant que des négociations avancées sont en cours avec le fonds d’investissement américain Clayton, Dubilier & Rice (CD&R) pour céder le contrôle d’Opella, a déclenché une tempête politique. Ce transfert de propriété, qui pourrait placer le Doliprane sous contrôle étranger, a immédiatement suscité l’indignation de figures politiques de gauche comme de droite.

Marine Tondelier, écologiste de premier plan, a vivement critiqué cette transaction, soulignant qu’aucune leçon n’avait été tirée de la pandémie de Covid-19. Selon elle, cette vente symbolise une nouvelle fois l’abandon de la souveraineté sanitaire par la France. Dans le même ton, Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste, n’a pas mâché ses mots, qualifiant cette vente de « honte » et de « scandale national ». Pour lui, il s’agit d’un nouveau coup porté à la souveraineté du pays.

Une levée de boucliers politique

Face à cette situation, des parlementaires de tous bords politiques ont uni leurs voix pour exhorter le gouvernement à bloquer la transaction. Un groupe de soixante députés, issus de divers partis, notamment Ensemble pour la République (EPR), Horizons, le MoDem (rebaptisé Démocrate), et la Droite républicaine, a pris l’initiative d’envoyer une lettre à Antoine Armand, ministre de l’économie. À l’origine de cette mobilisation, le député Charles Rodwell (EPR) appelle le gouvernement à utiliser l’article du code monétaire et financier permettant de bloquer les investissements étrangers dans des secteurs sensibles, en invoquant des risques pour la sécurité nationale.

Ces élus estiment que le Doliprane est un médicament essentiel à la santé de millions de Français, et que sa vente à un acteur étranger mettrait en péril la souveraineté du pays en matière de santé. Ils rappellent également que cette vente va à l’encontre des efforts déployés pour rétablir l’indépendance de la France dans ce domaine stratégique.

Une désindustrialisation inquiétante

Parallèlement, les élus de La France insoumise ont également pris position, dénonçant une stratégie de désindustrialisation de la France. Selon eux, cette vente illustre le manque de considération des grands groupes pour l’avenir industriel du pays. Ils soulignent que Sani, qui a largement prité d’aides publiques via le crédit d’impôt recherche, n’a pas hésité à fermer plusieurs laboratoires de recherche ces dernières années, malgré les fonds perçus. Une situation jugée « scandaleuse » par plusieurs d’entre eux, qui voient dans cette vente un simple moyen d’enrichir les actionnaires au détriment de l’industrie nationale.

Laurent Wauquiez, patron de la Droite républicaine, et Yannick Neuder, rapporteur général du budget de la Sécurité sociale, se sont joints à cet appel, réclamant une intervention rapide de l’État pour protéger ce qu’ils considèrent comme des « fleurons » de l’industrie française. Ils estiment qu’il est impératif de préserver la souveraineté sanitaire du pays, en empêchant que des secteurs clés de l’économie passent sous contrôle étranger.

La menace pour l’emploi et la santé publique

La vente d’Opella suscite également des inquiétudes quant à ses répercussions sur l’emploi et la santé publique. La crainte d’une délocalisation des activités ou d’une réduction des effectifs est omniprésente, d’autant que la France a récemment connu des difficultés d’approvisionnement en paracétamol, une substance active essentielle contenue dans le Doliprane.

Boris Vallaud, leader des députés socialistes, a exprimé ses craintes quant aux conséquences de cette cession sur la disponibilité des médicaments. Il s’inquiète d’un potentiel impact négatif sur l’accès aux soins pour les Français, ainsi que sur l’emploi, notamment dans les sites industriels et de recherche de Sani en France.

Des garanties exigées par le gouvernement

En réponse à cette levée de boucliers, le gouvernement a pris position. Antoine Armand, ministre de l’économie, et Marc Ferracci, ministre de l’industrie, ont demandé des engagements fermes de la part de Sani et du potentiel repreneur. Ils exigent notamment que les centres de décision et le siège social d’Opella restent en France, afin de préserver l’empreinte industrielle de la filiale sur le territoire national.

Opella, qui est actuellement le troisième acteur mondial dans la vente de médicaments sans ordonnance, ainsi que de vitamines et de compléments alimentaires, gère une centaine de marques au-delà du Doliprane, dont Mucosolvan, Maalox et Novanuit. La valorisation de la filiale, bien que non ficiellement confirmée, serait estimée à environ 16 milliards d’euros, une somme qui fait de cette transaction une affaire majeure pour Sani et pour le secteur pharmaceutique français.

Les critiques d’Éric Coquerel sur le rôle de l’État

Sur le plan financier, les critiques sont également vives. Éric Coquerel, député et président de la commission des finances, a exprimé son mécontentement sur l’antenne de BFMTV. Il a souligné que Sani a bénéficié d’un soutien massif de l’État ces dix dernières années, notamment grâce au crédit d’impôt recherche, pour un montant avoisinant le milliard d’euros. Pourtant, malgré cette aide, le groupe n’a pas hésité à fermer plusieurs laboratoires de recherche en France, ce qui renforce les craintes d’une dégradation de l’industrie pharmaceutique nationale.

Pour Éric Coquerel, la revente d’Opella montre clairement que les grands groupes pharmaceutiques privilégient la rentabilité à court terme, souvent au détriment de la recherche, de l’innovation et de l’intérêt général. Il plaide pour que l’État prenne davantage de contrôle sur le secteur du médicament, afin de protéger la santé publique et de renforcer la souveraineté nationale.

Un débat qui s’intensifie

La vente d’Opella continue de cristalliser les tensions entre les différents acteurs politiques, économiques et sociaux en France. Ce débat met en lumière des questions prondes sur l’indépendance économique, la gestion des biens stratégiques en matière de santé publique, et la capacité de l’État à protéger les industries clés face aux appétits des fonds d’investissement internationaux.

Au-delà de la simple vente d’une filiale, cette affaire symbolise les défis auxquels la France est confrontée pour maintenir sa souveraineté dans des secteurs aussi vitaux que la santé et l’industrie. Le gouvernement devra désormais faire face à ces multiples pressions pour prendre une décision qui concilie les intérêts économiques et l’impératif de souveraineté

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