900 000 euros par Renault : Rachida Dati dans le viseur du parquet national financier

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Tony HOUDEVILLE

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INFORMATION • Le Parquet national financier (PNF) a récemment ébranlé la sphère politico-économique en France en réclamant un procès contre Rachida Dati, ministre de la Culture, et Carlos Ghosn, ancien dirigeant de Renault-Nissan. Au centre des accusations : une rémunération annuelle de 300 000 euros versée à l’ancienne eurodéputée pour défendre les intérêts du constructeur automobile au Parlement européen, une pratique illégale et révélatrice des liens troubles entre pouvoir politique et grandes entreprises.

Les faits remontent à 2009, lorsque Rachida Dati, fraîchement élue au Parlement européen, signe un contrat controversé avec une filiale de Renault-Nissan. Bien que ce dernier stipule des prestations juridiques sur plusieurs marchés étrangers, aucune preuve concrète de ce travail n’a été fournie. Entre absence de rapports d’activité et absence de justification de ses déplacements professionnels, l’enquête soulève des interrogations majeures sur la nature véritable de ces rémunérations, qui atteignent 900 000 euros sur trois ans.

Une influence cachée sous un masque juridique

Les éléments recueillis par le PNF pointent une réalité troublante : derrière ce contrat se cacherait un lobbying dissimulé. Selon l’enquête, Rachida Dati aurait usé de sa position d’eurodéputée pour influencer les décisions européennes en faveur de Renault. Des questions écrites soumises à la Commission européenne, validées au préalable par Carlos Ghosn, semblent corroborer cette hypothèse.

L’instruction dévoile également des courriels internes et des notes stratégiques de Renault-Nissan qui illustrent les attentes de l’entreprise envers Mme Dati. Parmi ces objectifs : neutraliser certaines mesures législatives coûteuses pour les constructeurs automobiles, comme les seuils de bruit des véhicules ou les normes sur les véhicules électriques. Ces éléments renforcent la thèse d’un « pacte corruptif », dissimulé sous l’apparence d’un contrat de conseil juridique.

Une défense fragilisée par des incohérences

Face à ces accusations, Rachida Dati se défend fermement. Elle qualifie le réquisitoire du PNF d’« infamant » et se présente comme victime d’un règlement de comptes interne à Renault. Cependant, les justifications avancées peinent à dissiper les soupçons. Ni les déclarations publiques de ses avocats ni les audits internes commandés par Renault ne permettent de prouver l’effectivité des prestations facturées.

Un rapport d’audit réalisé en 2019 par le cabinet Mazars pointe une absence totale de documents attestant de la nature des services rendus par Mme Dati. Ce vide documentaire, ajouté au manque de transparence concernant ses rémunérations et son rôle au Parlement européen, fragilise sa position. En outre, des notes internes retrouvées dans ses dossiers mettent en lumière les difficultés à justifier un cumul d’activités aussi large, renforçant l’idée d’une gestion douteuse de ses différents mandats.

Le Parlement européen : un terrain fertile pour les conflits d’intérêts

Cette affaire dépasse le cas individuel de Rachida Dati pour révéler un problème systémique : l’infiltration des intérêts privés dans les institutions publiques. Les eurodéputés, censés représenter les citoyens, se retrouvent souvent exposés à des pressions externes, notamment celles des grandes entreprises.

Dans le cas de Renault, les attentes envers Mme Dati étaient claires : influencer les décisions européennes dans le sens des intérêts du constructeur. Ces manœuvres soulignent la faiblesse des mécanismes de contrôle et la nécessité d’une réglementation plus stricte pour prévenir les conflits d’intérêts.

Carlos Ghosn, une pièce maîtresse de l’affaire

L’ancien dirigeant de Renault-Nissan, aujourd’hui réfugié au Liban, est également mis en cause dans cette affaire. Le PNF accuse Carlos Ghosn d’avoir orchestré et financé ce système pour obtenir un avantage stratégique au sein des institutions européennes. Bien qu’il soit déjà sous le coup de plusieurs mandats d’arrêt internationaux, ce nouvel épisode ternit davantage son image.

Vers un procès symbolique

La décision finale appartient désormais aux juges d’instruction, qui devront trancher sur la tenue d’un éventuel procès. Si les charges sont confirmées, ce procès pourrait devenir un symbole des dérives du pouvoir et du capitalisme. Il révélerait comment des figures politiques et économiques de premier plan ont pu exploiter les failles des institutions pour servir des intérêts privés, au détriment de l’intérêt général.

Cette affaire, au-delà de ses implications juridiques, interroge sur l’intégrité de nos élites et la place qu’elles accordent à la justice sociale. Face à ces révélations, l’urgence d’une réforme des mécanismes de contrôle au sein des institutions européennes se fait sentir. Enjeu majeur pour la démocratie, ce procès pourrait ouvrir la voie à une réflexion nécessaire sur la transparence et la responsabilité dans la sphère publique.

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