En un demi-siècle, les activités humaines ont décimé 73% des animaux sauvages

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Tony HOUDEVILLE

Rédacteur web

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INFORMATION • Nous sommes à un tournant critique de l’histoire de notre planète. Les activités humaines ont perturbé les écosystèmes à un point tel que leur rétablissement pourrait être impossible. Nous observons déjà les conséquences désastreuses de cette situation : la décoloration massive des récifs coralliens, la destruction accélérée des forêts tropicales, le recul des calottes glaciaires, ainsi que des bouleversements profonds des cycles de l’eau, une ressource pourtant vitale à notre survie sur Terre.

Ces phénomènes ne sont pas de simples anomalies naturelles, mais le résultat direct de décennies d’exploitation démesurée des ressources naturelles. Le dernier rapport du WWF, intitulé « Planète Vivante », tire la sonnette d’alarme : en seulement 50 ans, 73 % des populations d’animaux sauvages ont disparu. Cette hécatombe menace de plus en plus l’équilibre écologique mondial et nous rapproche de seuils critiques où la régénération des écosystèmes pourrait devenir impossible.

Une agriculture destructrice au cœur du problème

Les causes de cette dégradation rapide sont multiples, mais la principale est sans conteste l’agriculture intensive. Ce modèle d’exploitation, basé sur la production de masse, utilise 70 % des ressources en eau de la planète et contribue à plus d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Ironiquement, malgré cette exploitation effrénée des terres, un tiers de la population mondiale ne parvient toujours pas à accéder à une alimentation adéquate, tandis que nombre d’agriculteurs peinent à joindre les deux bouts.

Le rapport 2024 du WWF met en évidence des déclins particulièrement marqués dans les populations animales, avec une chute de 85 % des espèces d’eau douce, suivie de 69 % pour les espèces terrestres et de 56 % pour les espèces marines. Ces chiffres illustrent l’ampleur des dommages infligés aux habitats naturels et pointent du doigt les pressions humaines directes, telles que la surexploitation des ressources, l’introduction d’espèces invasives, les maladies, les effets du changement climatique et la pollution.

La biodiversité, une richesse essentielle menacée

La biodiversité, souvent perçue comme un simple inventaire d’espèces, est en réalité bien plus que cela. Elle constitue le socle de la vie sur Terre, garantissant un accès à la nourriture, à l’eau potable, et à l’air pur. La perte de biodiversité, notamment dans les récifs coralliens, ne menace pas uniquement la vie marine, mais aussi les millions de personnes vivant sur les côtes, qui dépendent de ces écosystèmes pour se protéger contre les tempêtes.

En plus de ses services écosystémiques, la biodiversité joue un rôle clé dans la régulation du climat, la pollinisation des cultures, et même la fourniture de médicaments. À titre d’exemple, les vautours, qui sont en déclin rapide en Afrique, remplissent une fonction indispensable en recyclant les carcasses d’animaux et en limitant la propagation des maladies. Leur disparition menace de déséquilibrer les systèmes écologiques sur lesquels reposent de nombreuses espèces, y compris l’Homme.

Les points de bascule : un danger imminent

Le rapport du WWF met également en garde contre les points de bascule écologiques, ces seuils critiques au-delà desquels les écosystèmes s’effondrent de manière irréversible. Un exemple frappant est la forêt amazonienne, dont 14 à 17 % a déjà été détruite. Si la déforestation atteint 20 à 25 %, cette forêt, souvent appelée le « poumon de la Terre », pourrait se transformer en savane, avec des conséquences dramatiques pour le climat mondial. Cette transformation relâcherait d’énormes quantités de carbone dans l’atmosphère, perturbant les régimes climatiques à l’échelle globale.

Un autre point de bascule concerne le gyre subpolaire, un courant océanique circulaire situé au sud du Groenland. Son effondrement pourrait modifier radicalement les conditions météorologiques en Europe et en Amérique du Nord. Ces points de bascule, bien qu’ils puissent paraître lents à se manifester, deviennent irréversibles une fois atteints, entraînant des changements brutaux et catastrophiques.

Un délai serré pour éviter le pire

Le rapport « Planète Vivante » souligne l’urgence d’agir. Les gouvernements et les institutions internationales doivent respecter les objectifs de développement durable et de protection de la biodiversité, tels que définis dans les accords internationaux, d’ici 2030. Pour ce faire, une transformation radicale des systèmes alimentaires, énergétiques et financiers est nécessaire. Le rapport propose notamment la création d’aires protégées exemptes d’exploitation humaine, avec pour objectif de conserver 30 % des terres et des océans d’ici 2030. Ces mesures, déjà appliquées à petite échelle, ont prouvé leur efficacité en ralentissant le taux d’extinction des mammifères, des oiseaux et des amphibiens de 20 à 29 %.

Cependant, ces succès ponctuels ne suffisent pas. Une approche plus large et concertée est nécessaire pour garantir la préservation de la planète à long terme. Le rapport appelle à une transformation en profondeur de nos modes de production et de consommation, en mettant l’accent sur des solutions fondées sur la nature, comme le reboisement, la restauration des zones humides et l’agroforesterie.

Faire la paix avec la nature : une nécessité pour l’avenir

Le rapport de WWF est un appel urgent à une réconciliation entre l’humanité et la nature. Les connaissances autochtones, souvent négligées, sont cruciales pour réinventer nos modes de vie et développer des pratiques durables, alors que ces populations continuent d’être injustement expulsées de leurs terres ancestrales. La nature ne peut plus être vue comme une simple ressource à exploiter, mais comme une alliée essentielle pour notre survie.

« Faire la paix avec la nature », comme le souligne María Susana Muhamad González, la présidente élue de la COP16, signifie accepter de vivre en harmonie avec les limites planétaires, sans les dépasser. Le compte à rebours est lancé, et les cinq prochaines années seront décisives pour l’avenir de la vie sur Terre. Plus que jamais, la prise de conscience et l’action collective sont nécessaires pour préserver un monde où les humains et la nature peuvent s’épanouir ensemble.

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