Alors que les homicides sont en forte baisse, pourquoi certains médias accusent-ils à tort l’immigration ?

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Tony HOUDEVILLE

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OPINION • Dans les années 1970, la France présentait un paysage bien différent de celui d’aujourd’hui : une immigration moindre, un contexte socio-économique marqué par les Trente Glorieuses, et pourtant, les actes de délinquance et d’incivilité existaient déjà. Contrairement à une idée répandue, la criminalité n’a pas émergé avec l’augmentation des flux migratoires. Les incivilités, les délits et même les crimes violents sont inhérents à toute société, qu’elle soit homogène ou diversifiée.

Des études historiques démontrent que la violence n’est pas un phénomène nouveau. Bien avant l’arrivée massive d’immigrés en France, la société connaissait déjà des épisodes de banditisme, des conflits sociaux et des violences domestiques. Ces faits rappellent une évidence : l’immigration n’a jamais été le facteur déclencheur ou aggravant de la criminalité.

Une diminution constante des homicides depuis les années 1980

Malgré le discours alarmiste véhiculé par certains, les statistiques montrent une réalité bien différente. Depuis le milieu des années 1980, le taux d’homicides en France a connu une baisse significative. Selon une analyse du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP), cette diminution est documentée par des données fiables et convergentes. Entre 1990 et 2023, le taux d’homicides pour 100 000 habitants a été divisé par deux, passant de 2,5 à environ 1,2.

Cette évolution va à l’encontre de la théorie de « l’ensauvagement » souvent utilisée pour relier immigration et insécurité. Elle souligne que l’augmentation de la diversité démographique de la France n’a pas conduit à une explosion des crimes violents, contrairement à ce que certains discours populistes voudraient faire croire.

Une perception d’insécurité déconnectée des faits

Si les données objectives révèlent une baisse des homicides et des vols avec violence, le sentiment d’insécurité parmi la population reste élevé. Près de 60 % des Français déclarent ne pas se sentir en sécurité, une perception largement amplifiée par la médiatisation des faits divers et par des discours politiques alarmistes. Pourtant, les enquêtes montrent que la majorité des citoyens ne sont pas directement touchés par des actes criminels.

Le politologue Thomas Guénolé, dans un débat face à Laurent Obertone, a démonté point par point les arguments reliant immigration et insécurité. En se basant sur les données du Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), Guénolé a montré que les violences physiques, sexuelles, et les vols affectent une infime minorité de la population. Il a également démontré l’absence de corrélation significative entre l’immigration et les homicides en France, avec un coefficient de corrélation de seulement 0,39, loin des seuils indiquant un lien substantiel.

Des causes multiples pour une criminalité complexe

La criminalité est un phénomène complexe, influencé par des facteurs socio-économiques, institutionnels et culturels. Le chômage, les inégalités sociales, le manque d’accès à l’éducation ou encore des politiques publiques inefficaces jouent un rôle bien plus déterminant dans la survenue des actes criminels que l’origine ethnique ou migratoire des individus.

Accuser l’immigration revient à ignorer ces causes structurelles et à détourner l’attention des véritables solutions. Cette simplification excessive profite à des agendas politiques jouant sur la peur et la division, au détriment d’un débat constructif et rationnel.

Des discours basés sur la peur plutôt que sur les faits

Des ouvrages comme La France interdite de Laurent Obertone alimentent ces stéréotypes en exagérant les liens entre immigration et criminalité. Ces récits s’appuient sur des données isolées, souvent sorties de leur contexte, pour susciter une peur irrationnelle. Cependant, les analyses rigoureuses, comme celles de Thomas Guénolé, rétablissent la vérité : les faits contredisent les thèses sensationnalistes.

Dépasser les stéréotypes pour une analyse juste

L’immigration n’est pas le moteur de l’insécurité en France. Les discours qui associent ces deux phénomènes s’appuient sur des perceptions et des stéréotypes, non sur des faits objectifs. Il est impératif de rejeter ces amalgames simplistes pour se concentrer sur les véritables causes de la criminalité : les inégalités, l’exclusion sociale et les politiques publiques inadaptées.

En prenant le recul nécessaire, il devient évident que l’immigration est souvent utilisée comme bouc émissaire pour détourner l’attention des responsabilités réelles. Construire une société plus sûre passe par des solutions inclusives et rationnelles, et non par la stigmatisation d’une partie de la population.

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